Les Camousse, une dynastie de tapissiers des manufactures royales de Beauvais et des Gobelins
Si la famille Vaudremer est peut-être originaire des Flandres (cf. chapitre précédent), la famille Camousse l’est avec certitude : l’ancêtre est un dénommé Georges Camousse, tapissier flamand né au début du XVIIe siècle, recruté avec ses deux fils pour renforcer la toute nouvelle manufacture royale de tapisseries de Beauvais, fondée par Colbert en 1664 (deux ans après celle des Gobelins). Georges et son fils François sont à l'origine d'une véritable dynastie de tapissiers qui œuvrera pour les manufactures de Beauvais et des Gobelins durant plus de cent trente années.
Il est écrit dans un ouvrage de 1910 du ministère de l'instruction publique et des beaux-arts [1] : « Une famille en particulier, celle des Camousse, venue de Bruxelles, fournit à la manufacture [de Beauvais] une race abondante d'estimables travailleurs ». La famille est également mentionnée dans un ouvrage de 1992 consacré lui aussi à la manufacture de tapisserie de Beauvais et édité par le Mobilier national, où l’on peut lire : « Nombreux dès l’origine, les flamands venaient de Bruxelles et de ses environs, de Lille, de Tournai, d’Anvers ou d’Audenarde. Leur présence marqua profondément et durablement la Manufacture. Certaines familles se perpétuèrent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Tel fut le cas, par exemple, des Camousse arrivés de Bruxelles en 1664 (ou peut-être en 1668), dont un descendant dirigera la Manufacture à partir de 1794 » (j’y reviendrai).
Bruxelles est alors capitale des Pays-Bas espagnols et fabrique les plus belles tapisseries d’Europe, qu’aucun autre pays n’égale. Colbert, qui souhaite faire rayonner la France à travers le commerce, et non seulement sur les champs de batailles, « vole » leur savoir-faire aux flamands en créant des manufactures royales de tapisseries et en débauchant des artisans réputés. Il procède d’ailleurs de la même manière pour le verre, alors quasi-monopole de la République de Venise.
Tapissier au XVIIe s.
Tapissier au XVIIIe s.
A ses débuts, la manufacture royale est dirigée par Louis Hinart, marchand et maître tapisser, puis par son fils Jean-Baptiste. C’est une famille en vue, une fille de Louis ayant épousé Michel Hardouin, contrôleur général alternatif des bâtiments, jardins, tapisseries et manufactures du roi, frère de Jules Hardouin-Mansart, célèbre architecte de Louis XIV. Pourtant, les Hinart ne sont vraisemblablement pas de bons gestionnaires puisqu’en 1684, le roi récupère l’entière propriété de la manufacture et fait appel au flamand Philippe Béhagle (Audenarde 1641 – Beauvais 1705) pour redresser la situation. Béhagle avait déjà fait ses preuves aux Gobelins et conserve la direction de la manufacture de Beauvais jusqu’à sa mort en 1705, non sans difficultés.
Dans l’ouvrage précité de 1910, il est écrit que Jean-Baptiste Hinart considérait que la mort de Colbert en 1683 et l’avènement de Louvois furent la cause de sa disgrâce et que les intrigues de ses ennemis réussirent à le faire déposséder. Béhagle, qu’il dénigre, parvient pourtant à relever glorieusement la manufacture de son état de déchéance, est-il précisé.
Pour ce faire, le nouveau directeur crée notamment une école de dessin et en confie la direction à son neveu Simon De Pape, qui n’en est pas moins un peintre talentueux. De Pape dirige l’académie de dessin de la manufacture jusqu’à sa mort en 1751 à l’âge de 88 ans. Son fils Simon le seconde, puis lui succède.
Dès 1684, Béhagle fait aussi venir bon nombre de nouvelles recrues des Flandres, qui travaillent en bonne intelligence avec le groupe le plus ancien des émigrés, déjà présent depuis une vingtaine d’années. La famille Béhagle, elle-même, s’allie ainsi avec la famille Camousse par le mariage de Jeanne, une petite-fille de Georges Camousse, avec François Eeckman, un autre neveu de Philippe Béhagle, tapissier celui-là.
Ce mariage a lieu en 1686, année de la visite de Louis XIV à la manufacture. Philippe Béhagle présente au roi ses meilleurs tapissiers, parmi lesquels se trouve François Camousse, le père de Jeanne. François est officier de tête, c’est-à-dire qu’il est chargé de la composition des personnages, de leur costume et de la carnation des figures, détails considérés comme les plus difficiles.
Louis XIV se montre particulièrement satisfait de la réussite de Béhagle et l’on inscrit même dans le jardin de la manufacture (aujourd’hui disparue) le souvenir de l’endroit où le roi complimenta le nouveau directeur en lui posant familièrement la main sur l’épaule [2].
Né à Bruxelles en 1637, François Camousse s’y marie le 6 mai 1661 et de cette union, naissent au moins neuf enfants, les uns à Bruxelles, les autres à Beauvais. Ses quatre fils, Georges, Philippe, Corneille et Pierre sont tapissiers et trois de ses cinq filles, Jeanne, Barbe et Anne, sont mariées à un tapissier.
Tous entretiennent des relations de proximité avec leur directeur et sa famille, mais malgré l’union de Jeanne Camousse et François Eeckmann, la hiérarchie est tout de même maintenue entre les deux clans et les Camousse recherchent surtout l’honneur du parrainage des Béhagle et des De Pape, que l’on voit témoins aux mariages des membres de la famille, puis parrains ou marraines de leurs enfants.
Corneille Camousse, l’un des quatre fils de François, est notre ancêtre direct. Il est lui aussi tapissier de la manufacture de Beauvais. Le 2 juillet 1692, il épouse Catherine Favier, fille d’Anthoine Favier, de Beauvais, avec qui il a trois fils:
- Philippe, bachelier de théologie de la faculté de Paris [3] et curé de Maulers, non loin de Beauvais et tout près de Montreuil-sur-Brêche (cf. chapitre sur les Vaudremer) ;
- Nicolas, tapissier et concierge, c’est-à-dire intendant de la manufacture ;
- Adrien, notre ancêtre direct, maître tapissier à la manufacture.
Philippe Camousse, futur curé de Maulers, baptisé le 27 mai 1693 en l’église Ste-Madeleine, est porté sur les fonts baptismaux par Philippe Béhagle.
Nicolas Camousse est quant à lui baptisé le 28 janvier 1709 en l’église Saint-Thomas, la paroisse des tapissiers de Beauvais. Ses parents lui donnent pour parrain un certain Nicolas Levesque, conseiller du roi et prévôts des maréchaux, c’est-à-dire comandant de la maréchaussée (gendarmerie). Sa marraine est damoiselle Catherine Motte, fille de Gabriel Motte, échevin et juge-consul de Beauvais, et épouse du sieur Jean de Monchy, conseiller au présidial de Beauvais.
Je n’ai malheureusement pas pu consulter l’acte de naissance d’Adrien, le benjamin.
Leur grand-père François Camousse décède à Beauvais le 22 mai 1694, un an avant le terrible bombardement de sa ville natale par les troupes de Louis XIV, devant lequel il s’était respectueusement incliné quelques années auparavant.
Petit à petit, une partie de la famille va s’éloigner de Beauvais pour se rapprocher de la grande sœur des Gobelins. Cette migration a peut-être pour origine un événement survenu cette même année 1694, au cours de laquelle les graves difficultés financières que connait la manufacture parisienne conduisent au licenciement de ses tapissiers. Nombre d’entre eux sont alors employés à Beauvais, qui se porte bien, mais Béhagle rencontre à son tour des difficultés et lorsque les Gobelins rouvrent en 1699, tous y retournent, entraînant avec eux certains beauvaisiens.
C’est donc peut-être à partir de là que plusieurs membres de la famille Camousse s’installent à Paris. Cette bascule peut aussi, plus simplement, être une preuve supplémentaire de la collaboration étroite entre les deux manufactures royales. Il semble en tout cas que Corneille soit quasiment le seul des enfants de François, avec sa sœur Jeanne, à demeurer fidèle à Beauvais, car l’on retrouve aux Gobelins la plupart des autres frères et sœurs : Georges, Philippe, Pierre, leur sœur Barbe et son époux François Cornillon, leur sœur Anne et son époux Noël Rançon et enfin, leur nièce Marie-Françoise Hecmane, la fille de Jeanne et François Eeckman (le nom a été francisé entre temps).
Atelier de tapisserie des Gobelins au XVIIIe siècle
Leur renommée va alors dépasser les frontières et les emmener jusqu’en Russie lorsqu’en 1716, le tsar Pierre le Grand qui vient de fonder sa toute nouvelle capitale, Saint-Pétersbourg, fait appel à l'architecte Jean-Baptiste Alexandre Le Blond pour établir les plans du palais et des jardins de Peterhof, le Versailles russe. Le Blond emmène en effet avec lui une centaines d’artistes et artisans expérimentés et, parmi ces migrants autorisés par le Régent Philippe d’Orléans à s'établir à Saint-Pétersbourg en vertu d'un congé du 16 avril signé du duc d’Antin, figurent Philippe Béhagle le jeune, qui devient maître de la manufacture de tapisseries du Czar, Pierre Camousse, qualifié d’entrepreneur des tapisseries de sa majesté czarienne [4], son fils François, son frère Philippe, mais aussi Noël Rançon, leur beau-frère, époux d’Anne Camousse, lequel est issu d’une grande famille de tapissiers des Gobelins [5]
C’est un très long voyage pour l’époque et c’est par mer qu’ils rejoignent Saint-Petersbourg. Ils demeurent ensemble en Russie plusieurs années et l’on imagine la naissance de liens fraternels entre ces exilés qui étaient aussi cousins par alliance.
Marie-Françoise Hecmane, la fille de la tante Jeanne Camousse, est l’épouse de Jean Parmentier, lui aussi tapissier des Gobelins. Ils baptisent leur fille en l’église Saint-Hippolyte le 1er septembre 1722 et choisissent pour marraine la tante Anne Camousse, l’épouse « délaissés » de Noël Rançon, qui est alors installée dans ce même quartier, paroisse Saint-Martin du cloître, proche de Saint-Marcel [6]
Noël Rançon, rentré de Russie, décède peu de temps après et dans l’acte de tutelle fait à Paris le 2 mars 1730 au profit de ses deux fils, Noël et Jacques, alors âgés de 20 et 15 ans, il est qualifié de marchand tapissier de Paris. L’oncle Georges Camousse, tapissier des Gobelins comme ses frères, est désigné tuteur.
Les enfants de l’oncle Pierre Camousse grandissent eux aussi à Paris avec leur mère Catherine Naquet. Cette dernière décède très peu de temps après le départ de son époux pour la Russie, en 1716 ou 1717. C’est notre ancêtre Corneille qui devient alors le tuteur des enfants de son frère Pierre, absent. Dans l’acte passé devant notaire cette même année 1717, il est écrit que Corneille demeure à Paris, rue Mouffetard, où réside également sa sœur Barbe et l’époux de celle-ci, François Cornillon.
Parmi les enfants de Pierre qui sont sous la responsabilité de leur oncle Corneille, se trouve Marie-Louise Camousse, qui épouse vers 1730 Claude Adrien Coulon, encore un tapissier des Gobelins. Celle-ci donne naissance à un fils, prénommé Léonard Adrien, baptisé dans la chapelle Saint-Martin du cloître le 12 juillet 1731. Léonard Adrien Coulon est formé aux Gobelins à l’art de la tapisserie, mais il s’adonne surtout à un autre art, celui de la danse, et épouse une danseuse du nom de Jeanne Evrard. De leur union, naissent deux des plus célèbres danseurs de leur temps : Anne Jacqueline et Jean-François Coulon.
Anne Jacqueline Coulon, née en 1761, est « danseuse des ballets du roi ». Elle danse à l’opéra de Paris entre 1778 et 1802 et épouse le célèbre chorégraphe et directeur du ballet de l’opéra de Paris, Pierre Gardel.
Jean-François Coulon (1764 – 1836), plus célèbre que sa sœur, est « professeur de danse du grand opéra français » et « maître de ballet du théâtre de l’Odéon ». Professeur renommé, considéré comme le créateur du ballet romantique, il troque les chaussures à talon des danseuses de l’époque pour les chaussons de satin que nous connaissons aujourd’hui.
Un autre fils de l’oncle Pierre Camousse, prénommé Louis, sera cavalier au régiment de La Rochefoucauld. En 1747, il est domicilié chez sa sœur Marie-Louise et son beau-frère Coulon [7]. [paragraphe à compléter après recherches aux archives militaires de Vincennes]
Quittons les cousins parisiens et revenons à Beauvais quelques années en arrière, où vivent encore les enfants de Corneille, notre ancêtre. A la manufacture, les jeunes Camousse suivent eux aussi une véritable éducation artistique. Dans un rapport d’inspection de 1724, conservé aux archives nationales, on peut lire :
« (…) Nous sommes ensuite entrés dans le lieu appelé l’académie où les élèves et apprentis travaillent au dessin, nous y avons trouvé des bosses en plâtre, moulées d’après l’antique et d’après les meilleurs ouvrages modernes, représentant des corps d’hommes, de femmes, d’enfants et différentes parties du corps détachées, au nombre de 120. Nous avons fait appeler les apprentis, tant ceux qui dessinaient que ceux qui travaillaient aux tapisseries, lesquels ont été assemblés dans l’académie, ils se sont trouvés au nombre de 21 ».
Parmi eux, se trouvent Adrien et Nicolas Camousse, les fils de Corneille, alors adolescents. Leur professeur est Simon De Pape.
Dix années plus tard, en 1734, la direction de la manufacture est confiée par Louis XV au célèbre Jean-Baptiste Oudry, auréolé des titres prestigieux de peintre ordinaire du Roy et professeur de son académie royale de peinture et de sculpture. Oudry adapte la production à la demande de la riche clientèle en s’entourant des plus grands artistes de l’époque, dont François Boucher en particulier. De nombreuses commandes de l’Etat destinées aux cabinets diplomatiques participent alors au prestige des tapisseries de Beauvais dans le monde entier. Sous son mandat, la manufacture connaît ainsi son apogée.
A l’image de Philippe Béhagle qui, cinquante ans plus tôt, avait créé des liens professionnels et familiaux étroits avec la famille Camousse, ce nouveau directeur accorde toute sa confiance aux fils de Corneille et demande à Adrien, devenu un tapissier confirmé, de superviser la réalisation d’œuvres majeures, telles que la tapisserie qui suit, qui fait partie d’une série consacrée à la Chine. L’une de ces tentures royales est même envoyée à l’empereur de Chine, qui commande la construction d’un pavillon pour l’accueillir. Pour réaliser ces œuvres monumentales, Adrien collabore avec le célèbre peintre François Boucher, qui en a dessiné le carton (grand patron).
Quant à Nicolas, le frère d’Adrien, Jean-Baptiste Oudry lui offre un important poste d’intendance en le nommant concierge de la manufacture royale, poste qu’avait autrefois occupé Christophe Hinart, un fils de Louis Hinart. Nicolas conserve ce poste de nombreuses années.
La foire chinoise, tapisserie dessinée par le célèbre peintre François Boucher
et réalisée entre 1742 et 1745 pour Louis XV par notre ancêtre Adrien Camousse
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Adrien, notre ancêtre, se marie le 16 septembre 1737 à Beauvais avec Jeanne Catherine Comédé. C’est son frère Philippe, alors âgé de 44 ans et curé de Maulers, qui officie. Simon De Pape le vieux, directeur de l’académie de peinture de la manufacture, est son témoin de mariage.
De cette union naissent Claude Joseph Camousse, né en 1745, notre ancêtre direct, qui a pour marraine Marie-Madeleine De Pape, une fille de Simon le vieux, et Claude Nicolas Camousse, né en 1747 – et inhumé dans l’église Saint-Thomas deux ans plus tard – à qui l’on donne pour parrain son cousin germain, Jean Claude Camousse, le fils de Nicolas, alors âgé de 7 ans, futur directeur de la manufacture.
Jeanne Catherine Comédé est issue d’une vieille famille beauvaisienne. Elle est la fille de Jean Comédé et Anne Laisné et la nièce de Denis Laisné, curé de la paroisse Saint-Sauveur de Beauvais. Elle a une sœur et une tante paternelle qui se prénomment Angadrême, sainte patronne de Beauvais, preuve de l’attachement des Comédé à leur ville. Quant à sa mère, elle porte le même patronyme que la célèbre Jeanne Laisné, dite Jeanne Hachette, héroïne de Beauvais lors du siège de 1472. La parenté n’est pas établie, mais elle n’est pas impossible.
Aujourd’hui encore, chaque année à Beauvais, le dernier week-end du mois de juin, une fête célèbre sainte Angadrême et Jeanne Hachette, les deux figures tutélaires de la ville.
Corneille Camousse décède le 20 octobre 1746, âgé d’environ 80 ans. Son acte de décès est ainsi rédigé :
« Le 20e 8bre 1746 est décédé et le même jour a été inhumé dans l’église de St Thomas de Beauvais par moy curé de laditte église Corneille Camousse tapissier de la manufacture de Beauvais en présence de Me Philippe Camousse curé de Maulers, Nicolas Camousse et Adrien Camousse ses fils qui ont signé avec nous »
En 1754, un inventaire de la manufacture est entrepris à l’occasion du changement de direction. En qualité de concierge, c’est-à-dire intendant de la manufacture, Nicolas est le premier intéressé et participe donc activement, accompagné de Jean-Baptiste Oudry et du nouveau directeur, André Charlemagne Charron [8].
Jean-Baptiste Oudry décède peu de temps après, le 30 avril 1755. Il est inhumé le jour même dans l’église saint-Thomas, dont il était marguillier [9], non loin des membres des familles Béhagle, De Pape et Camousse. Nicolas signe l’acte de décès, accompagné de Simon De Pape le jeune.
On retrouve la signature de Nicolas dix-huit ans plus tard au bas de l’acte de mariage de son neveu Claude Joseph Camousse, notre ancêtre direct, qui s’unit à Catherine Rosalie Vaudremer au mois de février 1773.
Jean Claude, le fils de Nicolas, fait preuve de talents particuliers et parvient à se hisser au sommet de la hiérarchie de la manufacture, nommé directeur artistique en 1780. En 1793, dans une lettre adressée à l’Assemblée Nationale, il se présente comme « citoyen de la ville de Beauvais, régisseur maître de l’école de dessin et inspecteur des ouvrages qui se fabriquent en la manufacture » où il s’est occupé depuis son enfance, à l’exemple de ses aïeux « depuis 124 ans de père en fils ».
Il rappelle que depuis l'établissement de la manufacture de Beauvais, ses aïeux « ont eu l'avantage de former des élèves en tout genre et de posséder les places de confiance ; que Georges Camousse, parfait paysagiste, fut mandé de Bruxelles en 1668 avec ses deux fils : l'aîné, bon officier de tête et le second, excellent dans tous les genres d'ouvrages ».
En 1794, les instances révolutionnaires décident de lui confier la direction de la manufacture, devenue nationale, sous l’autorité des Gobelins. Beauvais emploie alors plusieurs centaines d’ouvriers. Jean Claude voit son traitement porté à 2 000 francs, au lieu des 1 200 qu’il percevait jusqu’alors. Il décède le 26 messidor an 8 (15 juillet 1800) à l’âge de 60 ans
Ainsi se termine avec panache l’histoire de cette dynastie de tapissiers. On ne retrouve pas de Camousse au sein des manufactures de Beauvais et des Gobelins au XIXe siècle.
Noël, notre ancêtre des Invalides, petit-fils d’Adrien, a probablement lui aussi été formé à Beauvais à l’art de la tapisserie, mais à l’instar de nombre d’ouvriers et apprentis tapissiers de la manufacture, il s’engage dans l’armée républicaine au début des années 1790. Il met ainsi fin à la tradition familiale en choisissant d’embrasser définitivement la carrière des armes et s’éloigne du Beauvaisis. Il épouse à Arcueil en 1798 Geneviève Françoise Sassey, de plus modeste condition.
Les Sassey ont subi de plein fouet la crise de la fin du XVIIIe siècle qui a considérablement appauvri les campagnes et provoqué l’effondrement de l’ordre social. En épousant Geneviève, une blanchisseuse des bords de Bièvre (probablement employée au sein de la manufacture du cousin Louis Simon Vaudremer), Noël épouse aussi les valeurs révolutionnaires, car sa belle-famille a elle-même adhéré aux idéaux nouveaux de justice sociale (voir chapitres « Naissance des idées révolutionnaires chez notre ancêtres parisiens » et « La construction de Paris au XIXe siècle »).
L’ascendance de Geneviève avait pourtant acquis une réelle notabilité en Hurepoix, région disparue à la Révolution, où se trouvait alors le village d’Arcueil (voir chapitre suivant).
[1] Réunion des sociétés savantes des départements de la Sorbonne
[2] Histoire de la tapisserie du Moyen-Age jusqu’à nos jours, de Jules Guiffrey, éditée en 1886
[3] Sous l’ancien régime, le baccalauréat sanctionne cinq années d’études supérieures en droit, en théologie, en médecine ou en art
[4] Mention dans l’inventaire après décès de son épouse Catherine Naquet 11 mars 1717 MC/ET/XII/335 et dans l’acte de tutelle des enfants de Pierre et Catherine, passé devant notaire à Paris
[5] cf. ouvrage du ministère de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes de 1893 : Réunion des sociétés des beaux-arts des départements
[6] cf. acte de baptême du 1er septembre 1722
[8] Cf. documents d’histoire parisienne n°20, ouvrage publié avec le concours de l’Ecole pratique des Hautes Etudes.
[9] Voir lexique
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